Réforme du concours d’enseignant : « On est en train de brader l’école ! »

professeur des ecoles

La réforme du concours d’enseignant vient d’être officiellement adoptée, permettant désormais aux candidats titulaires d’un Bac+3 de se présenter. Cette décision marque un tournant significatif dans le recrutement des enseignants, visant à rendre la profession plus accessible et à répondre aux besoins croissants en personnel éducatif.

Cette réforme intervient dans un contexte de pénurie d’enseignants, où de nombreuses écoles peinent à pourvoir tous les postes vacants. En abaissant le niveau de diplôme requis, le gouvernement espère attirer un plus grand nombre de candidats potentiels, tout en maintenant des critères de sélection rigoureux pour garantir la qualité de l’enseignement.

Retour sur les enjeux de cette réforme, ses implications pour le système éducatif et les réactions qu’elle suscite dans le corps enseignant et au-delà.

Quelles sont les nouvelles conditions pour devenir enseignant contractuel ?

Pour enseigner dans les collèges, lycées généraux et technologiques, un diplôme de Bac +3 est requis, tandis que pour les lycées professionnels, un Bac +2 est suffisant, selon les diplômes professionnels exigés dans certaines disciplines.

Les candidats doivent être de nationalité française ou ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, avoir un casier judiciaire vierge et être aptes physiquement. Le contrat proposé est un CDD, à temps plein ou partiel, et il couvre la durée nécessaire, incluant les vacances scolaires si le contrat s’étend sur une année scolaire.

La réforme des concours de l’enseignement, qui entrera en vigueur en 2026, modifie donc les exigences pour devenir professeur. Le concours sera accessible avec un Bac +3, remplaçant le master (Bac +5) actuellement requis. Cette réforme, la cinquième en trente ans, introduit une licence spécifique pour le professorat des écoles dès la rentrée 2026.

Les concours en fin de master 2 et en fin de licence coexisteront en 2026 et 2027, avant la disparition du concours en fin de master 2 en 2028. Les enseignants devront s’engager à exercer le métier pendant quatre ans après leur formation.

Quels sont les détails de la réforme du concours

La réforme des concours de l’enseignement prévoit que les concours se dérouleront au printemps 2026, avec une formation professionnalisante de deux ans comprenant le master 1 et le master 2. Les rémunérations prévues seront de 1 400 euros nets pour le master 1 et 1 800 euros nets pour le master 2.

Cette réforme introduit également les Licences Préparatoires au Professorat des Écoles (PPPE), qui accueilleront près de 80 % des lauréats. Les lauréats intégreront les Écoles normales supérieures du professorat (ENSP) et auront le statut d’élève stagiaire en master 1, puis de fonctionnaire stagiaire en master 2.

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Des tests nationaux pour les niveaux L1 et L2 dispenseront d’épreuves du concours, et des modules complémentaires seront proposés aux étudiants d’autres filières dès la rentrée 2024.

Un stage d’observation à mi-temps sera inclus en master 1, avec une rémunération pour les stagiaires. Cette réforme vise à optimiser la formation des enseignants tout en réalisant des économies grâce à l’absorption des licences par la LPPE. Les syndicats expriment des inquiétudes quant à la structuration de la formation et l’avenir des personnels, soulignant un risque de décrochage entre le premier et le second degré.

La réforme de l’enseignement suscite bien des interrogations…

L’impact de la réforme des concours de l’enseignement se manifeste principalement par une redéfinition des parcours académiques et professionnels des futurs enseignants. En abaissant le niveau de diplôme requis à un Bac +3, la réforme ouvre la profession à un plus large éventail de candidats, potentiellement plus jeunes et plus diversifiés. Cette décision pourrait répondre à une pénurie d’enseignants dans certaines régions, tout en posant des questions sur la qualité de la formation initiale.

L’introduction des Licences Préparatoires au Professorat des Écoles (PPPE) est conçue pour offrir une formation plus ciblée et professionnalisante, mais elle soulève aussi des interrogations quant à sa capacité à remplacer les formations plus longues et approfondies.

La nouvelle structure de formation, avec l’intégration des Écoles normales supérieures du professorat (ENSP), vise à professionnaliser davantage la formation des enseignants. Les lauréats bénéficieront d’un statut d’élève stagiaire en master 1, évoluant vers celui de fonctionnaire stagiaire en master 2.

Cette évolution du statut pourrait offrir une meilleure reconnaissance professionnelle et une sécurité de l’emploi accrue. Les syndicats expriment des préoccupations concernant la transition entre les niveaux de formation et le potentiel déséquilibre entre le premier et le second degré. Les enseignants devront envisager un environnement en mutation, où les attentes professionnelles et les conditions de travail pourraient évoluer rapidement.

La réforme pourrait avoir des implications sur la rémunération et les perspectives de carrière des enseignants. Avec une rémunération prévue de 1 400 euros nets pour le master 1 et 1 800 euros nets pour le master 2, les stagiaires bénéficieront d’un soutien financier pendant leur formation. Ces montants soulèvent des questions sur l’attractivité de la profession et la capacité à retenir les talents dans un contexte où la concurrence avec d’autres secteurs est forte.

Les enseignants devront également s’engager à exercer pendant quatre ans après leur formation, une condition qui pourrait dissuader certains candidats potentiels. Ce cadre contraignant pourrait influencer les décisions de carrière des futurs enseignants, qui devront peser les avantages de la stabilité professionnelle contre les exigences de l’engagement à long terme.

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Une réforme ouverte dès 2026

La réforme ouvre la voie aux candidats dès le niveau bac + 3 pour postuler à partir de la session 2026. Cette initiative vise à élargir l’accès aux concours, permettant ainsi aux étudiants de se lancer plus tôt dans leur parcours professionnel.

Les lauréats qui réussiront le concours à bac + 3 auront l’opportunité d’intégrer un master professionnalisant de deux ans. Ce programme est conçu pour préparer efficacement les étudiants au monde du travail, en leur offrant une formation pratique et ciblée.

Durant la période transitoire de 2026 à 2027, deux formats de concours coexisteront : l’un pour les candidats à bac + 3 et l’autre pour ceux à bac + 5. Cette transition vise à assurer une adaptation progressive au nouveau système, tout en maintenant les opportunités pour les étudiants de différents niveaux.

« On brade l’école ! » – Le cri de colère de Michelle B., ex-institutrice révoltée

Dans un petit village du Sud-Ouest, entre vignes et champs de tournesols, Michelle B. nous accueille dans sa maison à colombages, nichée au cœur d’un jardin qu’elle bichonne autant que ses anciens élèves. Âgée de 67 ans, cette ancienne professeure des écoles n’a pas sa langue dans sa poche. Connue pour ses coups de gueule aussi tonitruants que ses éclats de rire, elle suit de près l’actualité éducative, même à la retraite.

Et cette fois, c’est la réforme du concours des enseignants qui fait bouillir son sang gascon. Entourée de livres de pédagogie et de photos de classe jaunies, elle nous livre une interview aussi vibrante qu’émouvante.

Michelle, la réforme du concours des enseignants permet désormais aux titulaires d’un Bac+3 de se présenter. Qu’en pensez-vous ?

Je suis outrée, vraiment. On est en train de faire passer la profession d’enseignant pour un petit job d’étudiant. Mais c’est un métier ! Un vrai métier, avec une complexité humaine, psychologique, pédagogique… Je veux bien qu’on ouvre des portes, mais pas qu’on transforme l’école en centre d’animation sous-payé. Quand j’ai commencé, on m’a appris à tenir une classe, à comprendre les enfants, à faire face aux parents, aux inspections, aux crises. Avec trois ans d’études, même bien motivés, ils n’ont pas les armes. C’est une mise en danger pour eux et pour les élèves.

On parle pourtant d’une réponse à la pénurie d’enseignants. Vous n’y voyez pas une solution d’urgence acceptable ?

C’est une rustine sur un pneu crevé ! Quand il manquait un prof dans mon école, on se débrouillait, on mutualisait. Mais là, ce n’est pas du dépannage, c’est institutionnalisé. Et puis on ne parle pas de n’importe quel métier : on forme des citoyens, on transmet des valeurs. C’est comme si on disait “Y’a plus de médecins, mettez des internes au bloc !” Vous imaginez ? Je me souviens d’une jeune contractuelle, Julie, arrivée en septembre, larguée au bout de deux semaines. Elle pleurait dans la salle des maîtres. Et c’est moi, la vieille retraitée, qu’on a rappelée pour tenir sa classe. Voilà le résultat.

Vous parlez avec passion, on sent que ce métier vous habite encore. Quel a été votre plus grand moment en tant qu’enseignante ?

Ah ! C’était en 1997. Une classe de CP, pleine d’énergie. Il y avait Lamine, un petit garçon qui ne parlait presque pas, très réservé. Et un jour, en plein exercice de lecture, il s’est levé et a lu une phrase entière. Sans hésiter. Toute la classe a applaudi. Moi, j’ai pleuré. C’était ça, mon salaire. Ce moment-là. Et je me demande si, avec des formations écourtées, on leur laissera la place de vivre ça. Ce n’est pas juste un métier, c’est une vocation. Une mission.

Et ces nouvelles Licences Préparatoires au Professorat des Écoles (PPPE), qu’en pensez-vous ?

C’est un bel emballage, mais l’intérieur… On crée des circuits rapides, on met des stages à mi-temps, des tests dès la L1, et on leur promet un poste s’ils acceptent d’être payés au lance-pierre pendant deux ans. Ce n’est pas une formation, c’est un bizutage. J’ai vu des élèves craquer en simple stage de deux semaines. Vous croyez que 1 400 euros par mois pour tenir une classe de 28 gamins, parfois en REP, ça va les motiver longtemps ? C’est une usine à démissions !

Si vous aviez un message à adresser à un jeune qui veut devenir professeur aujourd’hui, que lui diriez-vous ?

Je lui dirais : « Bravo, tu choisis le plus beau métier du monde… mais prépare-toi à te battre. Pas seulement contre la fatigue, les copies ou le bruit. Tu vas devoir défendre ton métier, chaque jour. Ne laisse jamais les décideurs oublier que tu es plus qu’un pion dans une réforme. Tu es un repère, un phare pour des enfants. » Et je lui dirais aussi de ne pas avoir peur de pleurer, ni de rire fort. C’est ça, être prof.

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Michelle B. n’a peut-être plus de craie entre les doigts, mais son feu intérieur n’a pas faibli. Et si la réforme passe, elle, elle ne passe pas sur l’attaque d’une profession qu’elle considère sacrée. En nous raccompagnant, elle ajoute avec malice : « Si jamais vous trouvez un ministre qui veut venir tenir une classe une semaine, qu’il m’appelle. Je lui prépare une petite dictée niveau CE1. Sans correcteur automatique. » On n’en doute pas une seconde.

Fabrice DURAND

Fabrice DURAND

Entrepreneur et passionné par l'orientation professionnelle, j'ai créé terminales.fr pour vous accompagner dans le choix de vos études supérieures. Je suis également responsable du groupe Facebook Orientation scolaire, et de nombreux sites consacrés aux métiers.

1 réflexion au sujet de « Réforme du concours d’enseignant : « On est en train de brader l’école ! » »

  1. Brader l’école, pourquoi une telle affirmation ? Elle n’est fondée sur aucun c
    L’école ne s’est jamais aussi mal portée que depuis que les enseignants sont issus de bac +5 !
    Pour enseigner, pas besoin de sortir de St Cyr, il faut avant tout être motivé, avoir accès à une meilleure formation professionnelle avec un mélange de théorie et d’application sur le terrain, un peu comme autrefois dans les écoles normales.

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