Chaque année, près de 10 000 étudiants en médecine se voient refuser l’accès à la deuxième année d’études, malgré des besoins croissants en professionnels de santé. Face à cette réalité, le ministre de la Santé envisage de supprimer le Numerus apertus, une décision qui pourrait bien redéfinir l’avenir de la formation médicale en France.
Mais qu’est-ce que le Numerus apertus et pourquoi suscite-t-il autant de débats ? Ce système, en place depuis des décennies, limite le nombre d’étudiants admis en deuxième année de médecine, une mesure qui a longtemps été critiquée pour son caractère restrictif et parfois injuste.
Analyse d’une réforme potentiellement révolutionnaire qui pourrait transformer le parcours des futurs médecins et répondre aux enjeux du système de santé français.
Quel avenir pour le numerus clausus en médecine ?
Le numerus clausus, instauré en 1971, a longtemps régulé l’accès aux études de médecine en France. Avec des chiffres oscillant entre environ 8 500 étudiants dans les années 1970 et seulement 4 000 dans les années 1990, ce système a vu sa fin législative en 2019, avec une application dès la rentrée 2020.
Ce changement a introduit deux nouveaux parcours : le Parcours accès santé spécifique (Pass) et la Licence accès santé (LAS), remplaçant la première année commune aux études de santé (PACES).
En parallèle, le numerus apertus, qui fixe un nombre minimum d’étudiants admis, a été déterminé par les universités et les Agences régionales de santé (ARS). En 2021, le Conseil d’État a demandé à 15 universités d’augmenter de 20 % leurs capacités d’accueil en deuxième année. Yannick Neuder, Ministre chargé de la Santé, a récemment annoncé la suppression du numerus apertus pour former davantage de médecins.
Vers la fin du numerus apertus dans les études de médecine ?
Le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a pris une décision audacieuse en annonçant son intention de supprimer le numerus apertus dans les études de médecine. Cette mesure, instaurée en 2020, avait pour but de fixer un nombre minimum d’étudiants pouvant accéder à la deuxième année de médecine. Elle était adaptée aux capacités d’accueil des facultés, mais semble aujourd’hui remise en question.
Ce projet de loi, qui suscite déjà de nombreux débats, sera examiné par le Sénat le 17 juin 2025. La suppression du numerus apertus pourrait transformer radicalement l’accès aux études médicales. Les facultés devront s’adapter à cette nouvelle donne, tout en maintenant la qualité de l’enseignement.
Les étudiants et les professionnels de santé attendent avec impatience les conclusions du Sénat. Cette décision pourrait ouvrir la voie à une réforme profonde du système éducatif médical en France. En attendant, le débat reste ouvert et les opinions divergent sur l’impact potentiel de cette mesure.
Émilie (Limoges) « Une décision qui soulève des questions »
En tant qu’étudiante en médecine à Limoges, j’ai ressenti un mélange d’espoir et d’inquiétude après l’annonce de la suppression du numerus apertus par le ministre Yannick Neuder. Cette décision, bien que potentiellement bénéfique pour de nombreux aspirants médecins, soulève des questions fondamentales sur la capacité des universités à absorber un afflux d’étudiants. Avec une baisse de 20% du nombre d’enseignants universitaires en médecine sur les trois dernières décennies, je crains que la qualité de notre formation ne soit compromise.
À Limoges, nous avons déjà constaté des difficultés à trouver des stages de qualité, une situation qui pourrait s’aggraver avec l’augmentation des effectifs. Les infrastructures actuelles semblent déjà saturées, et sans un plan concret pour augmenter les capacités de formation, je crains que cette mesure ne crée plus de problèmes qu’elle n’en résout. Les discussions que j’ai eues avec mes collègues révèlent une inquiétude partagée : comment garantir une formation de qualité si les ressources humaines et matérielles ne suivent pas?
Le manque de places en internat est également une préoccupation majeure. Actuellement, il est déjà difficile pour nous, étudiants, de trouver des postes qui correspondent à nos aspirations professionnelles. Si le nombre d’internes augmente sans une augmentation proportionnelle des capacités d’accueil, cela pourrait entraîner une compétition accrue et potentiellement décourager certains d’entre nous. Je suis impatiente de voir comment les autorités comptent répondre à ces problèmes pour assurer un avenir prometteur à notre génération de médecins.
Augmentation des places et problèmes logistiques
Depuis la suppression du numerus clausus, le nombre d’étudiants en deuxième année de médecine a augmenté de manière significative. En 2019, on comptait 9 571 étudiants, chiffre passé à 11 341 en 2022, soit une hausse de 18,5 %. La tendance se poursuit avec une prévision de 12 000 étudiants pour la rentrée 2025, marquant une augmentation de 70 % en moins de dix ans.
D’ici 2027, ce chiffre pourrait atteindre 16 000. Cette expansion ne se limite pas à la médecine : les filières de maïeutique, odontologie et pharmacie comptaient 5 500 étudiants en 2022, avec une augmentation notable en odontologie de 5 % sur trois ans.
Face à cette croissance, des problématiques logistiques émergent. Le Conseil d’État a insisté sur une augmentation de 20 % des places en première année d’études de santé (PASS et LAS) en 2021. Le PASS est d’ailleurs le cursus le plus demandé sur Parcoursup.
Cette hausse nécessite davantage d’enseignants et d’infrastructures, tandis que la qualité des stages, capitale pour la formation, pourrait être compromise par un nombre accru d’étudiants.
Les réactions divergent : Jérémy Darenne de l’ANEMF exprime une méfiance quant à l’annonce, tandis que Benoit Veber de la Conférence des doyens souligne l’importance d’un plan concret pour soutenir cette augmentation.
Focus sur la santé mentale et la formation
Au-delà des chiffres, l’accent est mis sur la santé mentale. Le ministre Yannick Neuder a annoncé l’objectif d’augmenter le nombre d’internes en psychiatrie, passant de 500 à 600 par an à partir de 2027. Chaque étudiant en médecine et en paramédical devra réaliser un stage en psychiatrie. Le nombre de personnes formées aux gestes de secourisme mental devrait atteindre 300 000, contre 165 000 actuellement. Ces initiatives visent à améliorer la prise en charge de la santé mentale, notamment pour les jeunes, et à introduire des « coupe-fil » pour faciliter l’accès aux soins en cas de troubles comportementaux.
Le financement reste un enjeu majeur, avec des budgets alloués à la santé mentale, mais jugés insuffisants par le ministre. Des postes de médecins et d’infirmières scolaires sont prévus, bien que cela ne comble pas entièrement les besoins croissants.
Quels sont les impacts sur la qualité de l’enseignement ?
La suppression du numerus apertus soulève des interrogations sur la qualité de l’enseignement médical. Avec l’augmentation du nombre d’étudiants, les universités doivent s’adapter pour maintenir un niveau d’enseignement optimal. Cette adaptation nécessite non seulement des infrastructures adéquates, mais aussi un recrutement accru de professeurs qualifiés. Le risque est que, sans ces ajustements, la qualité de la formation puisse décliner, ce qui pourrait avoir des répercussions sur la compétence des futurs médecins. Les enseignants actuels pourraient être surchargés, ce qui affecterait leur capacité à offrir un encadrement personnalisé aux étudiants.
Un autre aspect à considérer est l’impact sur les stages pratiques, essentiels dans la formation médicale. Avec plus d’étudiants, les hôpitaux et cliniques partenaires doivent pouvoir accueillir ce flux croissant sans compromettre la qualité des expériences cliniques. Les stages sont cruciaux pour le développement des compétences pratiques et la compréhension des réalités du terrain. Si les établissements de santé ne peuvent pas suivre le rythme de cette augmentation, les étudiants pourraient se retrouver avec des stages moins formateurs, ce qui pourrait nuire à leur préparation professionnelle.
L’impact sur la recherche médicale ne doit pas être négligé. Un nombre accru d’étudiants pourrait signifier une participation plus importante aux projets de recherche, ce qui est positif. sans une augmentation proportionnelle des ressources disponibles pour la recherche, cela pourrait également diluer les opportunités pour chaque étudiant de s’impliquer de manière significative. La recherche est un pilier de l’innovation médicale, et il est capital que les étudiants aient accès à des projets de qualité pour contribuer au progrès médical tout en enrichissant leur formation académique.
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